Que vous commenciez par cette étape (ou non), le rôle de la société dans laquelle vous évoluez ne doit pas être sous-estimé dans la compréhension des opportunités et des obstacles qui favorisent et qui s’opposent à une transformation positive vers le bien-être (mental). Nous sommes bien conscients, naturellement, des facteurs qui vont bien au- delà de l’approche sociétale. De nombreuses façons, le bien-être dans une relation durable avec la nature et la santé mentale sont devenus des questions de portée mondiale, depuis quelques années. Toutefois, cette partie de la formation se limitera aux aspects sociaux et mettra l’accent sur le fait que les méthodes basées sur le contact avec la nature et les actions collectives devront toujours tenir compte de la durabilité de la nature.
Contrairement aux approches individuelle et collective, nous avons manqué d’outils et de méthodes confirmés pour une transformation au niveau sociétal. Ceci est dû, en partie, à la rapide évolution des sociétés (occidentales) et en partie au manque de courage et de savoir- faire dans la création de modèles (et de pratiques!) en matière de bien-être. Donc, il semblerait qu’il s’agisse à la fois d’un problème de nature théorique et de nature pratique qui doit être affronté.
Toutefois, les cadres conceptuels et les innovations pratiques en matière de coproduction et capital social nous aident à comprendre la nécessité d’une dynamique de transformation positive dans les sociétés occidentales modernes.
L’un des outils théoriques les plus utiles, qui ont fait leurs preuves, est le fruit des théories de la philosophe américaine de la société Nancy Fraser (née en 1947). Ses définitions conceptuelles et ses études sur la redistribution, la reconnaissance et la représentation placent dans la juste perspective l’amélioration du bien- être. En quelques mots, le bien-être de la société ou d’une communauté en tant que microcosme d’une société, n’est pas atteignable sans s’attaquer, simultanément, aux inégalités sociales (redistribution), à la diversité culturelle et au multiculturalisme (reconnaissance) et aux processus de décision dans les sociétés démocratiques, dans une nouvelle perspective de démocratie directe ("représentation"). Tout ceci peut vous sembler un peu difficile et/ou hors sujet, mais je vous garantis que cela vaut la peine d’y réfléchir! Comme le disait justement le célèbre sociologue finlandais Antti Eskola (1934-2018): "Rien n’est plus pratique qu’une bonne théorie". Et nous le savons bien, du moins d’après la physique quantique et l’"utilisation" pratique des armes nucléaires.
Nous avons choisi de commencer par des sujets plus concrets sur la coproduction et des idées sur le capital social. Nous poursuivrons par la présentation de certaines théories de Nancy Fraser : en lisant d’autres publications à ce sujet vous pourrez vous rendre compte de leur mise en pratique.
Dans ce chapitre, vous pourrez passer de la réflexion sur la coproduction et le capital social aux " bases de la transformation sociale vers le bien-être", avant de conclure par une analyse des leçons apprises et de retourner, peut-être, au début pour un deuxième tour!?
Je vais vous parler de mon plus grand rêve, depuis longtemps, concernant la promotion de la santé mentale en Finlande! Au retour d’un merveilleux voyage en Italie qui m’a ouvert les yeux et l’esprit, dans mon pays tout aussi beau, quoique d’une manière différente, j’ai réalisé que le fait de vendre son travail dans un contexte collectif – au lieu de le faire, comme c’est le cas le plus souvent, dans un contexte individuel – peut être bien plus productif du point de vue du bien-être mental et même plus amusant! En travaillant dans une coopérative sociale, on offre des services et des produits dans le cadre d’un processus de production qui promeut la santé (mentale) et ne nuit pas à sa propre santé. Ce qui implique, naturellement, l’adoption d’un point de vue contraire au mode de production capitaliste, qui se fonde sur la création du profit au détriment de la santé des travailleurs
Sans aucun doute, mon expérience et mon rêve de créer des coopératives sociales et de travail ont été négligés et ignorés pendant des années : à cette époque-là, j’avais l’impression de parler chinois et mon rêve n’intéressait personne, ici, en Finlande. Au bout de quelques années, les choses ont changé, momentanément, en mieux, bien que maintenant, depuis quelques années, mon rêve semble à nouveau avoir perdu tout attrait.
Pour en savoir plus:
P. Villotti; S. Zaniboni & F. Fraccaroli:
Les entreprises à économie sociale en Italie. Social cooperatives in Italy. (en français avec un résumé en anglais) (pas de téléchargement gratuit)(in French with an English summary) (obs! download not for free) L’Encéphale. Volume 40, Supplement 2, June 2014: pp. 57-65. A Case study: Community Mental Healthcare. Trieste, Italy. https://www.livingwellsystems.uk/trieste
Toutefois, il existe d’autres pratiques et d’autres concepts qui touchent de près la production coopérative, dont la coopération, la coproduction de bien-être et le capital social.
Vous trouverez ci-dessous les définitions de ces concepts…
Coproduction : ce n’est pas un simple mot ni un simple concept, c’est la rencontre de plusieurs esprits à la recherche de solutions communes. En pratique, la coproduction réunit des personnes qui utilisent les services et qui sont consultées, qui participent et qui travaillent ensemble, à la réalisation, d’un bout à l’autre, d’un projet qui les concerne de près. Lorsque la coproduction fonctionne vraiment, les personnes qui utilisent les services et les soignants sont considérés, par les organisations, comme des partenaires, opérant sur un pied d’égalité, qui partagent le pouvoir et ont le même impact sur les décisions adoptées.
Dans la production de services sociaux, la coproduction peut être définie comme suit:
Dans le cadre de la coproduction, des personnes, des membres des familles, des soignants, des organisations et des délégués travaillent ensemble sur un pied d’égalité, en partageant leurs pouvoirs, leurs compétences et leur expérience pour concevoir, fournir et suivre la prestation de services et la réalisation de projets.
La coproduction reconnaît que les personnes qui ont recours à l’assistance sociale et aux services de santé (et leurs familles) possèdent des connaissances et une expérience qui peuvent aider à améliorer les services, non seulement pour elles-mêmes, mais aussi pour les autres utilisateurs, ce qui pourrait être le cas pour chacun d’entre nous, à un certain moment de notre existence.
Théoriquement, il existe différentes définitions de la coproduction. Deux des principaux experts dans ce domaine, Victor Pestoff et Tacho Brandsen, travaillent sur ce sujet depuis un moment. Pestoff donne une définition simple, selon laquelle la coproduction accompagne la cogestion et la cogouvernance:
La coproduction désigne une organisation dans le cadre de laquelle des citoyens produisent, du moins en partie, les services qu’ils utilisent. Ces citoyens ne bénéficient pas d’aides financières ou d’autres types d’aides des organismes publics pour développer un nouveau service ou améliorer un service existant. Toutefois, sur les sites de coproduction de services, on trouve souvent des agents publics qui fournissent une assistance directe aux citoyens, aux associations d’animation sociale ou à de petites organisations à but non lucratif.
Cogestion : ce terme désigne un cadre dans lequel plusieurs entités travaillent ensemble à la coordination de la prestation d’un service ou d’un projet. La participation directe des utilisateurs ou des citoyens n’est pas nécessaire pour permettre la cogestion, mais ce sont les acteurs de différents secteurs et organisations qui exploitent leurs ressources respectives pour contribuer directement, de manière pratique, à la réalisation d’un certain projet ou à la prestation d’un certain service.
Cogouvernance : il s’agit de la planification stratégique d’un certain service ou projet. Les acteurs de différentes organisations ou de différents secteurs déterminent les politiques prioritaires communes et peuvent les traduire en plans stratégiques. La cogouvernance est peut- être plus proche de l’activité de nombreuses associations de régénération sociale. Il convient de noter que, dans le cadre du développement et de la réalisation de chaque projet ou de la prestation de chaque service nous sommes susceptibles de trouver, d’une manière ou d’une autre, ces trois dimensions. Cependant, chacune d’entre elles est distincte des autres. La coproduction directe d’un service n’est pas la même chose qu’une collaboration étroite avec une autre organisation pour la cogestion de sa prestation. Il convient également d’établir une nette distinction entre la coproduction et la cogestion, qui concernent directement la prestation d’un service ou d’un projet particulier, et la cogouvernance, qui concerne principalement la stratégie et l’élaboration des politiques.
- Are You familiar with practices of co-production?
- Could co-production be helpful in realising your communal dreams?
- What could be the next two steps you could take to promote mental health in co-productive ways?
Vous trouverez des définitions plus synthétiques du concept de capital social par le lien suivant:
https://www.socialcapitalresearch.com/literature/definition/-
- Connaissez-vous les méthodes de coproduction?
- La coproduction peut-elle contribuer à la réalisation de vos rêves communs ?
- Quelles pourraient être les deux prochaines étapes de votre promotion de la santé mentale dans le cadre d’une coproduction?
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- Pensez-vous qu'une reconnaissance responsable du capital social et de ses différentes manifestations pourrait être utile pour promouvoir le bien-être dans votre communauté ?
- Selon vous, quelles sont les formes de capital social dont votre communauté est la mieux dotée, celles dont elle est moyennement dotée et celles qui nécessiteraient de véritables changements et transformations pour être réalisées ?
- Existe-t-il des obstacles à l'amélioration qualitative et à l'élargissement quantitatif de la participation sociale et de la démocratie directe ?